L'érosion des sols se manifeste dans plusieurs environnements du monde, et les techniques doivent être adaptées aux contextes physiques et humains locaux. Les techniques utilisées aux Etats-Unis ne sont pas les mêmes que celles utilisées en Afrique. Le premier cas est un contexte où les interventions sont lourdes en technologies et nécessitent moins de main d'œuvre ; le deuxième cas est un contexte où les techniques utilisent des matériaux simples et beaucoup plus de main d'œuvre.
Où que l'on soit dans le monde, il n'y a jamais qu'une seule solution pour combattre l'érosion. Réduire ou arrêter l'érosion nécessite généralement la mise en place de plusieurs techniques à la fois. L'utilisateur du sol est souvent quelqu'un qui est soumis à des contraintes économiques et à un manque de temps. De plus, il est l'héritier de toute une lignée de pratiques qu'il est prêt à modifier légèrement, mais qu'il ne peut pas facilement rejeter entièrement d'un jour à l'autre. Confronter à un problème d'érosion, et en compagnie d'un collaborateur spécialisé dans le domaine de l'érosion, l'utilisateur aimerait (évidemment) des solutions simples, économiques et faciles à mettre en place. Malheureusement, ce type de solution n'existe que rarement, et il y a pratiquement toujours une période d'essais et de tentatives qui peut durer quelques années avant de trouver une stratégie qui marche.
Les techniques décrites ci-dessous s'intègrent pour la plupart dans l'un des deux objectifs : maîtriser l'érosivité du ruissellement ou réduire l'érodibilité de la surface. Certaines méthodes, comme la mise en place d'un couvert végétal dense, tiennent compte des deux approches à la fois. Le couvert végétal réduit et ralentit le ruissellement tout en protégeant la surface du sol.
Dans le Module III, les facteurs qui conduisent à la dégradation des sols ont été décrits. Dans le schéma que nous avons décrit, les facteurs se combinent dans les processus et les processus à leur tour donnent naissance à des formes d'érosion. Afin d'enrayer l'érosion, il faut donc définir les facteurs qui déterminent l'intensité des processus. Il y a des centaines de techniques de lutte contre l'érosion et il serait à la fois difficile et rébarbatif d'en faire la liste entière ici. Cependant, les principales méthodes sont décrites ci-dessous et organisées en fonction des facteurs sur lesquels agissent les techniques.
Le plus simple serait de recouvrir les sols sensibles à l'érosion entièrement par de l'herbe ! Puisque ceci n'est pratiquement jamais possible, il y a d'autres méthodes pour utiliser la végétation afin de réduire l'érosion.
Ce sont des bandes d'une vingtaine de mètres de large qui piègent les sédiments et favorisent l'infiltration. Ces bandes se trouvent pratiquement toujours en bas de versant aux abords des ruisseaux parce qu'elles sont très souvent destinées à piéger les nitrates avant que celles-ci entrent dans l'eau. Les bandes enherbées sont efficaces pour réduire les sédiments et polluants qui entrent dans les cours d'eau, mais n'arrêtent pas l'érosion en amont sur les versants.
Afin de garder les sédiments sur les versants, il faudrait que les bandes soient placées en mi-pente mais ceci est difficile pour plusieurs raisons : difficulté de cultiver des pentes raides le long des courbes de niveau, manipulation supplémentaire à chaque passage sur la bande, problème de pesticides... Il est donc rare de trouver un agriculteur prêt à le faire.
Souvent, la bande enherbée ne trouve succès qu'auprès des exploitations d'élevage qui peuvent valoriser l'herbe en la fauchant pour le bétail.
Pour une parcelle destinée à une culture d'été, le sol est nu pendant l'hiver précédent. Il est possible de semer une culture à croissance rapide, souvent une légumineuse qui fixe l'azote du sol, pendant cette période sensible. Dans ce cas, l'inter-culture est semée en automne après la récolte et avant le semis de la culture d'été qui est semée au printemps. L'inter-culture est ensuite retournée mécaniquement afin de restituer les matières organiques au sol. Ceci assure un couvert végétal pendant l'hiver.
La culture sert à :
Après la récolte du grain, il s'agit de laisser les pailles en place et ne pas retourner le sol. Les pailles protègent la surface des impacts de gouttes, ralentissent l'écoulement et réduisent l'érodibilité du sol.
On recouvre la surface d'une couche de matières organiques (pailles, feuilles...) qui protège la surface et qui ralentit l'écoulement.
Ceci empêche les sédiments d'aller sur la route mais ne les retient pas sur les versants.
Il s'agit d'une combinaison de cultures au ras du sol et d'arbres dans la même parcelle. Le sol n'est jamais laissé complètement nu, les différents végétaux correspondent à des besoins différents : alimentation humaine et animale, bois...
Il n'est pas possible de changer les caractéristiques de la pluie, mais il est possible de réduire l'érosivité du ruissellement.
Ceci peut se faire de 2 manières :
On construit des bandes enherbées au fond des talwegs, des fossés et canalisations en bordure de parcelle, des rigoles à travers des parcelles.
L'objectif n'est pas de réduire le ruissellement mais de le diriger afin qu'il soit moins érosif. Ceci réduit la perte en terre en amont, mais peut théoriquement augmenter les crues en aval. L'inconvénient est que les fossés découpent la surface, ce qui rend les passages d'une parcelle à l'autre plus difficile. De plus, les fossés représentent une perte de terrain cultivable.
Ceci ne réduit pas l'érosion sur le versant, mais les sédiments sont piégés dans le bassin de rétention et c'est une mesure qui réduit les inondations en aval.
La topographie comprend la longueur de pente ainsi que son inclinaison.
Pour certaines cultures, notamment la vigne, il est possible de terrasser les parcelles afin d'éliminer l'impact de l'inclinaison de la pente. Cette pratique s'est faite beaucoup dans le passé quand la main d'œuvre n'était pas chère et quand les rendements faibles étaient la norme partout. Depuis la mécanisation, ce n'est rentable de le faire que sur des cultures à très forte marge par hectare.
Les anciennes parcelles étaient plus petites et avaient en bordure des haies ou talus. Il est possible de découper les grandes parcelles en 2 ou 3 parcelles différentes afin que la surface ne soit plus recouverte par une seule culture mais par un mélange de cultures d'été et d'hiver. Ceci, cependant, présente des inconvénients pour l'agriculteur : plus de travail (2 ou 3 semis par parcelle au lieu d'un), le risque de détruire une partie de l'autre culture par des pesticides, le risque d'endommager les bordures de culture lors du travail du sol de l'autre culture...
La stabilité structurale étant le meilleur indice d'érodibilité du sol, il est possible de réduire l'érosion en améliorant la résistance du sol à l'érosion.
Un apport de calcaire broyé (CaCO3) ou de chaux (CaO) favorise la structure du sol dans les sols acides.
Les matières organiques diffèrent dans leur capacité de promouvoir la stabilité structurale. Les engrais verts (jeune culture retournée) sont fortement minéralisés avec que 5% de l'apport contribuant à la formation de l'humus ; les fumiers peuvent contribuer à 25% à la formation d'humus. Les pailles (résidus de cultures) ont des valeurs intermédiaires.
Le grand problème est la répartition spatiale des sources de matières organiques : les zones d'élevage intensif ont un surplus, les zones de grandes cultures ont un manque, mais il n'est pas rentable de transférer l'excès d'une activité vers les parcelles de l'autre. De plus, les exploitations céréalières en proximité des zones d'élevage peuvent vendre les pailles aux éleveurs, réduisant fortement l'apport des matières organiques par l'enfouissement des résidus dans ces parcelles.
Ces produits chimiques sont des polymères synthétiques : c'est à dire des longues chaînes de molécules organiques qui ont souvent une charge électrostatique et qui jouent le rôle d'une matière organique hyper-performant dans le sol. Ils sont largement utilisés aujourd'hui dans la stabilisation des versants lors de la mise en place d'autoroutes (comme les géotextiles, d'ailleurs). Aujourd'hui, ces produits sont trop chers pour une utilisation sur des espaces importants et ne sont pas destinés à se développer dans ce but.
Sans entrer dans les détails des différents types d'outils agricoles, 3 principes peuvent être évoqués.
Certaines mesures ont été citées ci-dessus, la liste ci-dessous qui complète les interventions possibles concerne surtout les ouvrages de génie civil qui servent surtout dans les ruisseaux, ravins, et ravines.
Ils fonctionnent tous sur le même principe : ralentir la vitesse du ruissellement afin de provoquer un dépôt de sédiments. Certains ouvrages facilitent la mise en place d'un couvert végétal dans le dépôt de sédiments, ce qui peut favoriser une re-végétalisation des surfaces alentours. Les surfaces derrière les ouvrages représentent des zones fertiles puisqu'elles ont une abondance des sédiments fins et des bonnes conditions d'humidité. La végétation qui s'installe sert de source de semences pour le secteur autour du ravin. Ces ouvrages sont conçus autant pour maîtriser le ruissellement et les crus que pour réduire l'érosion.
Les types : barrages en béton armé, pierres sèches cimentées, gabion, grillage renforcé, banquettes grillagées, fascines sur versant, dans le ruisseau...
Un autre type de mesure est le bassin de rétention : le ruissellement entre dans le bassin creusé dans le sol, avec la perte de vitesse du ruissellement, une partie des sédiments se dépose dans le bassin. Cette mesure ralentit la concentration de l'eau dans les cours d'eau et sert donc aussi à réduire les crues et inondations.