La dégradation des sols dans le monde

La dégradation des sols dans le monde

III LES CONSEQUENCES POUR LES PAYS RICHES ET PAUVRES

Les impacts sur site et hors-site cités dans le chapitre 1 concernent à la fois les contextes des pays pauvres et riches. Les termes « pauvres » et « riches » sont utilisés de manière très vague et intègrent plusieurs paramètres : la richesse réelle (le PIB par exemple), les ressources dédiées à la préservation de l'environnement, la possibilité d'imposer une politique, les services de vulgarisation et d'accompagnement, les choix des populations à faire autrement…. Pour les pays pauvres, nous pouvons ajouter deux considérations supplémentaires à celles évoquées ci-dessus : la gravité des problèmes et certaines conséquences spécifiques.

III.1 La gravité des conséquences de la dégradation des sols

Là où la dégradation du sol et la diminution de sa productivité réduissent les rendements et les marges de profits dans les pays riches, elle présente un réel danger pour la survie des habitants des pays pauvres. L'érosion des sols dans les pays pauvres est un véritable danger pour leurs habitants et non pas, simplement, une atteinte à leur qualité de vie. La capacité de s'alimenter dans les pays pauvres dépend de plusieurs facteurs (prix des semences, conditions climatiques, accès aux marchés…), mais le socle demeure la fertilité innée du sol et sa perte représente forcément une atteinte à une qualité de vie déjà fragile.

Les problèmes hors sites suivent la même tendance et les problèmes sont plus graves dans les pays pauvres. L'exemple des pesticides est flagrant. Dans les pays riches, les autorités ont le pouvoir de déterminer les molécules qui seront mises sur le marché et épandues dans les parcelles. De nombreux produits, utilisés couramment dans le passé dans les pays riches et retirés de la vente à cause de leurs effets toxiques, représentent des solutions moins chères dans les pays pauvres où une législation de protection de l'environnement n'existe pas ou n'est pas appliquée. Aujourd'hui encore, des produits considérés trop toxiques pour être épandus dans les pays riches le sont sans vraie maîtrise dans les pays pauvres : les conséquences de l'apport des pesticides dans le milieu naturel sont donc beaucoup plus graves.

Même les taux d'intoxication des ouvriers et leurs familles sont beaucoup plus élevés dans les pays pauvres où les pratiques d'épandage sont moins sécuritaires et où les risques d'exposition lors du traitement et/ou par un contact avec des eaux polluées sont plus élevés.

III.2 Les conséquences spécifiques aux pays pauvres

Aux problèmes cités ci-dessus, nous pouvons ajouter des situations que nous rencontrons pratiquement exclusivement dans les pays pauvres. Parmi ceux-ci, nous pouvons citer la destruction des infrastructures. Dans les pays riches, il arrive qu'une route ou voie ferrée soit coupée par une érosion régressive ou un dépôt de sédiments, mais ces problèmes sont réglés rapidement et des solutions pérennes sont mises en place. Dans les pays pauvres, des ravines peuvent s'étaler sur des dizaines de km2 provoquant ainsi un découpage de la surface qui avale les infrastructures et rendent des parcelles cultivables difficilement accessibles.

Dans les conséquences hors site cités ci-dessus, aucune mention n'a été faite de l'ensablement des réservoirs hydro-électriques, d'eau potable ou d'irrigation. Dans les pays riches, les bassins versants alimentant des réservoirs sont strictement contrôlés. L'occupation du sol est réglementée, ainsi que l'accès au bassin versant lui-même. Ceci n'est pas le cas dans les pays pauvres où les barrages sont construits avec des fonds empruntés à long terme et pour des ouvrages qui, le plus souvent, ne sont utiles que pour une fraction de la période prédite à cause d'une mauvaise gestion en amont. L'absence d'une maîtrise de l'érosion en amont provoque un ensablement de la structure et nuit gravement à son fonctionnement. Les dettes s'étalent donc sur des périodes de décennies, longtemps après que l'ouvrage ait perdu sa rentabilité.

 

Enfin, nous pouvons terminer cette liste par un accroissement dans le nombre de catastrophes naturelles. L'érosion du sol réduit sa capacité à absorber et stocker l'eau de pluie : il y a donc moins d'eau qui s'infiltre dans le sol et plus d'eau qui ruisselle à la surface. Avec cela, les sols dégradés ont un couvert végétal moins dense : ceci contribue également à augmenter le ruissellement et rend le sol plus facilement érodé. La charge solide dans les eaux de ruissellement augmente le niveau d'eau pour le même débit liquide et tous ces facteurs contribuent à augmenter la fréquence de crues catastrophiques.